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"Quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire, j'ai la certitude d'être encore heureux"

Jules Renard

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16 juillet 2014 3 16 /07 /juillet /2014 09:07
Boris Akounine, Avant la fin du monde, Points

Ce petit recueil propose quatre nouvelles, quatre enquêtes de Fandorine, détective russe à la fin du 19° siècle.

La guivre des Baskarov : un serpent fantastique, la guivre (ou vouivre) terrorise une famille de la noblesse rurale. Les morts violentes se succèdent.

0.1 pour cent : un prince tué à la chasse. Accident ou meurtre prémédité ? Pourtant l'auteur du coup de feu mortel n'a aucun mobile.

Le five o'clock à Bristol : réfugié à Bristol Fandorine élucide avec l'aide de sa logeuse, une vieille dame perspicace, le mystère de la disparition d'un vieux lord... et de sa rivière de diamants. C'est l'occasion d'une petite pique particulièrement d'actualité :

"Le football, ce jeu dont les amis britanniques de Fandorine lui avaient rebattu les oreilles, n'avait en réalité aucun intérêt. (...) Persuadé que ce jeu n'avait aucun avenir, Eraste Pétrovitch quitta le stade (...)"

 

Avant la fin du monde : épidémie de suicides chez les vieux croyants (des schismatiques de Sibérie dont j'avais déjà parlé ici). Cette nouvelle est la plus longue, à peu près autant que les trois précédentes réunies. Cela permet donc à l'auteur d'installer un cadre plus détaillé, ce que j'ai apprécié. Il y a aussi une réflexion sur la russité :

"Les voyageurs s'adonnaient à deux éternels plaisirs russes : le chant et la conversation. Eraste Pétrovitch se demanda si ce n'était pas là l'origine de toute la littérature russe avec sa lenteur, ses investigations des tréfonds de l'âme et sa totale liberté de pensée. A quel moment et où les habitants de ce pays qui n'avait jamais connu la liberté pouvaient-ils enfin se sentir libre ? Lorsqu'ils se trouvaient sur la route ! Là, il n'y avait ni le propriétaire, ni le supérieur, ni la famille."

 

Une lecture facile et plaisante, parfaite pour une journée de vacances.

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14 juillet 2014 1 14 /07 /juillet /2014 14:32
Jonathan Coe, La pluie avant qu'elle tombe, Gallimard

La vieille tante Rosamond vient de mourir à 74 ans. Elle était malade du coeur. Elle a émis le souhait que sa nièce Gill retrouve Imogen qui est la petite-fille de Beatrix, cousine de Rosamond. Il s'agit de lui transmettre un lot de quatre cassettes audio sur lesquelles Rosamond a enregistré le récit de sa vie. Ce récit s'appuie sur 20 photos souvenir que Rosamond décrit mais cette description est aussi un prétexte à se remémorer les événements dans lesquels sont intervenus les gens et les lieux photographiés.

L'histoire commence pendant la seconde guerre mondiale quand les enfants sont évacués des villes britanniques pour les protéger des bombardements allemands et placés dans des familles à la campagne. Rosamond âgée de huit ans est envoyée chez ses oncle et tante. Elle y fait la connaissance de sa cousine Beatrix dont elle va devenir très proche. Cette relation, jamais facile, marquera le reste de sa vie.

 

Tout le récit est empreint de nostalgie. Nostalgie douce quand il s'agit des souvenirs d'enfance puis de plus en plus poignante à mesure qu'on avance et qui m'a fait venir des larmes aux yeux sur la fin. C'est un livre émouvant que j'ai lu d'une traite et que j'ai trouvé très bien écrit.

Il est question de relations familiales difficiles qui se transmettent, de filles mal-aimées par leurs mères sur trois générations.Il est question de la perte d'un amour dont on ne se remet jamais vraiment. Il est question d'un lac en Auvergne qui serait comme un avant-goût du paradis.

"Tu comprends, ça n'existe pas, la pluie, avant qu'elle tombe. Il faut qu'elle tombe, sinon ça n'est pas de la pluie." C'était un peu ridicule de vouloir expliquer ça à une enfant, et je regrettais de m'être lancée là-dedans. Mais Thea ne semblait avoir aucun mal à saisir ce concept -bien au contraire : au bout de quelques instants, elle m'a regardée avec pitié en secouant la tête, comme si c'était éprouvant pour elle de discuter de ces matières avec quelqu'un d'aussi obtus. "Bien sûr que ça n'existe pas, elle a dit. C'est bien pour ça que c'est ma préférée. Une chose n'a pas besoin d'exister pour rendre les gens heureux, pas vrai ?"

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12 juillet 2014 6 12 /07 /juillet /2014 06:16
T. C. Boyle, Water music, Phébus libretto

Les destins de deux personnages principaux s'entrecroisent dans Water music. L'explorateur écossais Mungo Park -personnage réel (1771-1806), premier Européen à repérer le fleuve Niger et à en tenter la descente et Ned Rise, enfant des rues grandi en petit délinquant et escroc.

Ned se tient à la porte de la chambre de l'Aléseur. Il s'est habillé en jeune lord. De loin, et dans l'obscurité du couloir, il pourrait presque passer pour un honnête citoyen. De près l'illusion s'envole. Et d'abord, il y a cette tête. De quelque manière qu'on la regarde, oui, sous quelque angle, sous quelque lumière, dans quelque pénombre, de quelque endroit ou position que ce soit, ce n'est jamais qu'une gueule de petit dessalé. Celle du jeune voyou qui, les bottes sur son pupitre, flemmarde en classe, celle du vaurien qui fiche le feu aux robes des vieilles dames et sirote l'encre de l'école. Celle de l'adolescent qui traînaille, se vautre et terrorise le marchands de fruits, celle du mécréant qui fume de l'opium, qui se baigne dans le gin et qui du monde entier fait son pot de chambre. Celle du jeune maquereau qui, pour finir, est en train de manigancer du vilain, voire de l'outrageant, là, à la porte de la chambre de l'Aléseur, à l'auberge de la Tête de Campagnol, dans le Strand.

Alors que Mungo risque sa vie en Afrique, Ned joue la sienne dans les bas-fonds de Londres et côtoie des personnages au moins aussi féroces que les Maures du Sahara. L'histoire finira par réunir nos deux héros.

Pour ma relecture du mois de juin j'ai choisi Water music qui m'avait enchantée il y a une dizaine d'années et je n'ai pas été déçue. J'ai retrouvé le même plaisir mis à part le fait que je connaissais déjà la fin. Alors, pourquoi faut-il lire Water music ?

 

Pour les aventures pleines de péripéties, de rebondissements et d'imagination.

 

Pour la galerie de personnages fouillés, même les rôles secondaires. J'apprécie particulièrement Ailie Anderson, la fiancée puis femme délaissée de Mungo qui essaie néanmoins de vivre sa vie en autonomie mais fini par renoncer et Johnson, l'ancien esclave devenu guide et interprète de Mungo, grand amateur de littérature britannique.

 

Pour l'humour et l'ironie dont fait preuve l'auteur tout du long mais il y a aussi des passages poignants quand sont décrites les conditions d'existence d'un misérable ou d'un enfant des rues.

 

Pour se régaler d'un livre excellemment écrit et, je crois aussi, très bien traduit.

 

Bref, c'est un ouvrage foisonnant et complet dont je ne peux que conseiller la lecture.

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23 juin 2014 1 23 /06 /juin /2014 16:20
Ann Granger, Un intérêt particulier pour les morts, 10-18

Angleterre, 1864. Après la mort de son père, Elizabeth Martin, célibataire de bientôt 30 ans, se retrouve seule au monde. Elle accepte le poste de dame de compagnie que lui offre bien charitablement la veuve de son parrain, tante Parry, et déménage à Londres pour s'installer auprès de cette dernière. Dès son arrivée Elizabeth est mêlée à une affaire criminelle : le corps de la précédente dame de compagnie de tante Parry vient d'être retrouvé, la jeune femme a été assassinée. Elle avait quitté la maison sans prévenir deux mois plus tôt puis envoyé une lettre pour expliquer qu'elle s'était enfuie avec un homme. C'est l'inspecteur Benjamin Ross de Scotland Yard qui mène l'enquête et Elizabeth va lui prêter main forte.

Voici un roman policier que j'ai lu facilement mais sans grand enthousiasme. Les héros ne sont pas antipathiques mais je ne découvre rien de bien nouveau par rapport à ce que j'ai déjà pu lire sur cette époque, par exemple les séries d'Anne Perry. C'est un peu la même galerie de personnages. On retrouve le clergyman moralisateur mais hypocrite, le jeune héritier insouciant mais finalement bon garçon, les domestiques au courant de tout ce qui se passe dans la maison, le flic d'origine modeste et qui s'est élevé grâce à son intelligence.

Quant à l'intrigue policière je ne l'ai pas trouvée très palpitante et parfois même assez maladroite. Je pense ainsi à un personnage qui se ronge les ongles. Ce tic révélateur de nervosité permet de le reconnaître comme complice. Un peu facile !

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17 juin 2014 2 17 /06 /juin /2014 17:43
Helen Simonson, La dernière conquête du major Pettigrew, 10-18

Ernest Pettigrew, veuf de 68 ans, major en retraite de l'armée britannique, est devenu l'ami -et plus peut-être- de Mme Jasmina Ali, veuve de 10 ans sa cadette, d'origine pakistanaise et propriétaire de l'épicerie du petit village d'Edgecombe Saint Mary, sur la côte sud de l'Angleterre. L'évolution de cette relation bouleverse la vie de nos deux protagonistes, bien sûr, mais aussi celle de leurs familles et de leur communauté car parents et amis y sont majoritairement défavorables.

Roger, le fils unique du major, un jeune loup de la city aux dents longues, se voit bien hériter de son père dès que possible et l'arrivée d'une belle-mère potentielle le contrarie. Du côté de la famille de Mme Ali, on compte sur elle pour s'occuper d'une vieille dame. Quant aux membres du club de golf dont fait partie le major, ils prétendent que leur réprobation n'a rien à voir avec la couleur de la peau de Mme Ali mais uniquement avec son origine sociale...

Ah que voilà une charmante histoire ! Si la fin ne fait aucun doute dès le début, les péripéties sont nombreuses pour y arriver. Le tout est plutôt bien écrit et avec une pointe d'humour pince sans rire comme je l'aime. J'ai passé un plaisant moment de lecture.

L'avis de Lounima.

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15 juin 2014 7 15 /06 /juin /2014 12:46
Traudl Junge, Dans la tanière du loup, Les confessions de la secrétaire d'Hitler, Texto

A 20 ans Traudl Junge voulait devenir danseuse. Pour gagner sa vie elle travaillait comme secrétaire mais son objectif était la danse. En 1941 -elle a 21 ans- elle veut s'installer à Berlin mais son employeur munichois lui met des bâtons dans les roues. Par l'intermédiaire d'Albert Bormann, aide de camp d'Hitler, parent d'une amie danseuse, elle obtient un poste à la chancellerie du Reich fin 1942 puis devient rapidement une des secrétaires d'Hitler.

Traudl va passer près de trois ans près d'Hitler qui veille sur elle avec une attention paternelle et qu'elle considère comme le meilleur patron qu'elle ait eu. Que ce soit dans la Tanière du loup en Prusse orientale ou au Berghof en Bavière, les secrétaires d'Hitler non seulement travaillent avec lui mais aussi mangent avec lui et passent leurs soirées avec lui -il se couche rarement avant 5 heures du matin. La jeune femme est complètement sous l'influence du Führer. C'est la guerre et elle le déplore car son pays est victime de restrictions et de bombardements mais jamais elle ne s'interroge sur la responsabilité de son patron dans cette situation ni sur les politiques menées par les nazis. Les rares pensées gênantes sont vite balayées. Dans son récit -écrit en 1947- elle parle essentiellement de l'ameublement des lieux, des menus et des sorties à la maison de thé, jamais de son travail, à se demander si elle n'est pas plutôt employée comme dame de compagnie. Elle dit, ce que j'ai déjà vu ailleurs, que Hitler est un personnage charismatique qui fascine ses interlocuteurs. Bien obligée de la croire quand on voit comment se comportent ses proches et pourtant elle décrit un mode de vie bourgeois et des conversations de café du commerce dont je ne vois pas bien ce qu'ils peuvent avoir de fascinants.

 

 

A partir de novembre 1944, toute la petite société qui entoure Hitler déménage pour la chancellerie et le bunker de Berlin et va y rester jusqu'à la chute du Reich en mai 1945. Les troupes soviétiques et américaines s'approchent de la capitale mais sous terre on continue de croire jusqu'en février que la victoire est possible. Le mois d'avril est une sorte de longue veillée funèbre. Hitler est devenu apathique et organise son suicide. Une partie de son entourage quitte le bunker pour tenter de sauver sa peau. Traudl fait partie de ceux qui restent et envisagent de mourir avec le Führer. Elle s'est fait délivrer une capsule de cyanure mais une fois Hitler mort l'instinct de vie est le plus fort.

 

Après la guerre Traudl a été jugée irresponsable du fait de son jeune âge. En 1947-1948, elle a mis par écrit ses souvenirs sur sa période au service d'Hitler puis elle a refermé cet épisode de sa vie. Autour d'elle on lui disait qu'en effet elle était bien jeune et qu'elle ne pouvait pas savoir. Ce n'est que des années plus tard qu'elle a réalisé son aveuglement. Elle a relu son manuscrit et a été effrayée et remplie de honte par son manque de critique et de distance. Elle a compris que l'alibi de la jeunesse ne tenait pas :

Je dois être souvent passée autrefois devant la plaque commémorative de Sophie Scholl dans la Franz-Joseph-Strasse, sans la remarquer. Un jour, elle m'a frappée et quand j'ai réalisé qu'elle avait été exécutée en 1943, alors que ma vie auprès de Hitler ne faisait que commencer vraiment, j'ai été profondément choquée. Sophie Scholl était aussi à l'origine une fille du BDM [Ligue des jeunes filles allemandes], elle avait un an de moins que moi et elle avait très bien compris qu'elle avait affaire à un régime de criminels. Tout à coup, l'excuse a disparu pour moi.

Elle a traversé des périodes de dépression. Finalement elle a rencontré l'écrivaine Melissa Müller qui l'a convaincue de publier son manuscrit. Cette publication date de 2002. Traudl Junge est morte la même année.

 

 

Je connaissais déjà le personnage de Traudl Junge pour l'avoir vue dans le film La chute et l'avoir retrouvée dans le livre La chute de Berlin d'Antony Beevor. J'ai donc été très intéressée de découvrir son témoignage dans la liste des ouvrages proposés par Masse critique chez Babelio. Et je n'ai pas été déçue de ma lecture que j'ai trouvée passionnante.

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10 juin 2014 2 10 /06 /juin /2014 14:26
Jean-Christophe Rufin, Le grand Coeur, Folio

Le grand Coeur est une vie romancée de Jacques Coeur (1395-1456), grand marchand et qui fut argentier du roi Charles 7, c'est-à-dire qu'il était chargé de fournir à la cour les meubles et tous les objets (précieux) dont elle pouvait avoir besoin (on est à une époque où la cour se déplace encore de château en château). C'est la fin de la guerre de 100 ans, la France est ruinée, la monarchie fragilisée. Il faut relancer le commerce et imposer le roi comme seul à gouverner. Jacques Coeur et Charles 7 vont s'y employer de conserve pour le plus grand bénéfice de tous les deux :

Maître de l'Argenterie, je mesurais désormais la véritable utilité d'être aussi banquier. En consentement des crédits, je rendais accessible ce que les autres marchands se contentaient de proposer au prix fort. L'achat, avec cette méthode, devenait indolore.
Cependant, en recourant à l'emprunt, mes clients se passaient autour du cou un noeud d'abord lâche mais qui, peu à peu, se resserrait. Les bourgeois n'étaient pas concernés par ce péril, car ils disposaient d'assez d'argent pour payer comptant. Mais les nobles et jusqu'aux princes l'employaient largement. Le roi avait lui-même encouragé cette pratique et il m'avait offert sa garantie en cas de difficulté de recouvrement. Il savait ce qu'était le crédit. Jadis, aux temps difficiles, il y avait eu recours, au point de se voir parfois refuser la livraison de certaines commandes par des négociants qui ne lui faisaient plus confiance. Engagé dans une lutte sans merci contre les princes, il avait compris quel usage redoutable il pouvait faire de cet outil. Ceux qui déposaient les armes et le rejoignaient se voyaient comblés de ses largesses. Ils bénéficiaient des services de l'Argenterie, d'abord sous forme de dons, pour sceller la réconciliation. Puis venait le temps des achats et bientôt, pour tenir leur rang à la cour, des prêts et des dettes. En peu de temps, le fier allié était dans ma main, c'est-à-dire dans celle du roi.

Jacques Coeur nous est présenté comme un homme moderne, un personnage en avance sur son temps, déjà plus dans le Moyen-âge, bientôt dans la Renaissance. Il voyage, en Orient, en Italie et en ramène des idées novatrices. Tout ceci est fort intéressant et pourtant je peine à accrocher à ma lecture. Ce qui me gêne c'est la narration choisie. Ici c'est Jacques Coeur lui-même le narrateur et je déplore que ce narrateur ait un peu trop souvent tendance à se présenter en "pauvre riche". Il n'aime rien tant que la simplicité mais sa charge l'oblige à vivre dans le luxe. Pour parvenir à ses ambitions il a du écraser des innocents mais personne ne le lui reproche autant que lui-même. Je dois dire que j'ai du mal à compatir.

 

Jean-Christophe Rufin explique dans la postface  que, à partir des événements de la vie de Jacques Coeur qui sont connus, il a voulu faire vivre le personnage en imaginant ses pensées et ses sentiments. Moi, ça ne me convainc pas. Je pense qu'une biographie plus classique m'aurait mieux convenu. Mais Aaliz, elle, a aimé.

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1 juin 2014 7 01 /06 /juin /2014 09:39
Wilkie Collins, La pierre de lune, Labyrinthes

En 1799, à l'occasion de la prise de Seringapatam, Inde, John Herncastle vole la pierre de lune, un gros diamant jaune consacré à Vishnou, et est maudit par le gardien de la pierre : "La Pierre de Lune se vengera sur vous et tous les vôtres".

A sa mort, John Herncastle lègue la pierre de lune à sa nièce Rachel Verinder. Elle reçoit le diamant le 21 juin 1848, à l'occasion de son 18° anniversaire. Tous ceux qui aiment Rachel -sa mère, lady Verinder, le fidèle majordome de la famille, Gabriel Betteredge, ses cousins, Godfrey Ablewhite et Franklin Blake- sont inquiets : l'oncle Herncastle n'a-t-il pas légué la pierre de lune à Rachel dans le but de se venger, en lui transmettant la malédiction, d'une branche de la famille qui l'a rejeté ? N'a-t-on pas vu rôder trois Hindous autour de la propriété du Yorkshire où doit se dérouler la fête d'anniversaire ? Et en effet, dans la nuit qui suit la fête, le diamant disparaît et les recherches entreprises pour le retrouver ont pour effet de plonger Rachel dans un état de nerfs abominable.

Après L'affaire de Road hill house, la relecture de La pierre de lune s'imposait pour moi car il est dit que le crime présenté par Kate Summerscale a inspiré Wilkie Collins, notamment dans le personnage du sergent Cuff qui mène l'enquête pour retrouver le voleur de la pierre. Mis à part le point de départ (la prise de Seringapatam, la malédiction, la disparition du diamant) je ne me souvenais de rien -la première lecture remonte à environ dix ans- si ce n'est que j'avais trouvé le roman très amusant et la relecture me confirme que cette oeuvre n'a pas pris une ride.

 

Ce qui m'a réjouie c'est la narration. A tour de rôle chaque épisode de l'enquête est raconté par un personnage différent qui en a été le témoin et qui présente son point de vue, enrichissant le récit de son histoire personnelle. On entend ainsi entre autres Gabriel Betteredge, le fidèle serviteur, inconditionnel de Milady et de miss Rachel. Il s'adresse au lecteur pour lui faire part de son désarroi et de ses hésitations :

S'il voyait juste, notre paisible demeure anglaise allait soudain être habitée par ce diabolique diamant hindou, apportant avec lui une horde de bandits que la vengeance d'un mort aurait déchaînée sur nous. Voilà la situation où nous nous trouvions, telle que me l'avaient révélée les dernières paroles de Mr Blake ! A-t-on jamais ouï pareille chose, au milieu du XIX° siècle, le siècle du progrès, et dans notre Angleterre qui se réjouit des bienfaits de sa constitution ? Non, personne n'avait jamais entendu une histoire semblable, et personne, donc, n'y croira. Néanmoins, je poursuis mon récit.

Miss Clack, nièce de lady Verinder, est une vieille fille jalouse de sa cousine Rachel et de l'amour que lui porte son cousin Godfrey. Cette femme mesquine cache sa petitesse derrière sa religion. C'est une bigote qui s'est donné pour mission de convertir son entourage et chaque fois qu'elle en a l'occasion, elle essaime des brochures pieuses dans l'environnement de ses proches mais invariablement ces documents lui sont rapportés sous des prétextes divers :

Je lui tendis la brochure, en frappant plusieurs fois de l'index la page où je l'avais ouverte.
- Ce n'est pas de moi ! m'écriai-je. Oh ! n'allez pas supposer que je vous donne à lire mon humble prose ! La manne dans le désert, Mr Ablewhite ! La rosée sur la terre desséchée ! Des paroles de consolation, de sagesse et d'amour ! Les paroles bénies de miss Jane Ann Stamper !
Je m'interrompis un moment, car j'étais à bout de souffle. Avant que j'aie eu le temps de me remettre, ce monstre qui avait pris une forme humaine s'écria :
-Que miss Jane Ann Stamper aille...

Quant à l'enquête elle même elle est plutôt bien menée et intègre un coup de théâtre assez surprenant.
Un seul bémol mais ce n'est pas la faute de l'auteur : mon édition est truffée de coquilles, fautes d'accords et petits mots manquant.

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17 mai 2014 6 17 /05 /mai /2014 13:07
Jonathan Coe, Bienvenue au club, Gallimard

A travers un groupe d'amis lycéens de Birmingham et leurs familles, Jonathan Coe nous présente l'Angleterre des années 1970, de 1973 à 1979 au moment où Margaret Thatcher arrive au pouvoir. Le personnage principal est Benjamin, un intellectuel contemplatif qui cherche à comprendre le monde et le sens de la vie. Benjamin compose de la musique, écrit des poèmes, un roman. Nombre de ces oeuvres inachevées sont dédiées à Cicely dont il est secrètement amoureux. Jonatahan Coe décrit fort bien les affres de l'adolescence quand enthousiasme et abattement se succèdent sans transition.

Il y a aussi Doug, le fils du leader syndical de l'usine British Leyland, usine fréquemment en grève à cette époque. Les manifestations de soutien aux grévistes sont violemment réprimées par la police.

Et Steve Richards, le seul élève noir de ce lycée privé huppé et que tout le monde surnomme Banania.

J'ai beaucoup apprécié cette lecture que j'ai trouvé très plaisante, souvent drôle. Il y a une suite (Le cercle fermé) que je vais tâcher de me procurer.

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11 mai 2014 7 11 /05 /mai /2014 14:57
Kate Summerscale, L'affaire de Road hill house, Christian Bourgois

En 1860 l'Angleterre se passionne pour un crime choquant, le meurtre du jeune Saville Kent, trois ans, dans la maison de ses parents. Le petit garçon a été emporté de son lit en pleine nuit -sans que sa nurse qui dormait dans la même pièce n'entende rien- égorgé, puis son cadavre a été jeté dans les latrines. Le meurtrier est forcément quelqu'un de cette maisonnée bourgeoise, membre de la famille ou domestique. Dans un premier temps l'enquête est assez mal menée par la police locale du Wilthshire puis les autorités font appel à Jack Whicher, détective de Scotland Yard.

A partir des nombreuses sources de l'époque, notamment la presse qui a suivi toute l'affaire de très près, Kate Summerscale étudie, à travers cet exemple, les débuts de la police d'investigation en Grande-Bretagne. Elle analyse aussi la façon dont les protagonistes et les faits ont influencé les auteurs de l'époque comme Wilkie Collins et Charles Dickens.

Alors qu'on nous présente les Britanniques comme des gens très jaloux de leur intimité, qui considèrent leur foyer comme un lieu où chacun doit être libre de mener sa vie comme il l'entend, les premières intrusions de la police chez les Kent scandalisent la presse mais rapidement les scrupules tombent et presse et public ne se lassent pas d'imaginer des scénarios qui décortiquent la vie privée de la famille : c'est la mère, c'est la nurse, c'est le père -qui couchait avec la nurse, c'est la fille adolescente, enfant d'un premier lit et jalouse de son petit frère... Des détectives en herbe vont jusqu'à envoyer leurs déductions à la police ou aux journaux.

C'est cette presse si présente qui me frappe le plus. Le nombre de journaux à l'époque était beaucoup plus élevé qu'aujourd'hui. Il n'y avait pas la télévision.

Moi qui suis une lectrice assidue d'Anne Perry j'ai trouvé fort intéressant cette incursion dans un vrai crime de l'époque victorienne.

L'avis de Maggie.

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